Démystifier le taux de sucre dans les vins
Découvrez tout sur le taux de sucre dans les vins, de sa transformation pendant la fermentation à son rôle dans l’équilibre du goût. Focus sur les spécificités des vins québécois et les mythes entourant le sucre en bouteille.
Plusieurs personnes s’attardent beaucoup au taux de sucre quand arrive le moment de choisir un vin sur les tablettes. Mais quel est réellement l’impact du sucre dans le un vin? Plongeons dans la bouteille pour démystifier les mythes entourant le taux de sucre dans le vin.
Tout d’abord, il faut savoir qu’il y a très peu de sucre dans les vins du Québec. La plupart des analyses affichent des taux de sucre de deux grammes par litre. C’est presque indétectable. En comparaison, un jus de raisin du commerce contient 152 grammes de sucre par litre.
Et ce n’est pas parce que les vins d’ici sont si différents de ceux d’ailleurs à ce niveau, mais c’est surtout parce que presque tous les sucres sont transformés en alcool pendant la fermentation. Ceux-ci sont «mangés» par les levures, transformant le jus de raisin en vin. Pas de sucre : pas d’alcool!

Le sucre est donc nécessaire et fait partie intégrante de la fabrication d’un vin.
«Le glucose-fructose s’accumule dans le raisin quand celui-ci subit sa maturation», explique Dominique Fink, présidente et cofondatrice du laboratoire Oenoscience, un laboratoire spécialisé dans l’analyse chimique et microbiologique de boissons alcoolisées.
Plusieurs éléments au champ vont influencer le taux de sucre qu’on va retrouver dans un raisin : le cépage, les conditions climatiques (la chaleur), la façon dont le vigneron va conduire et traiter sa vigne, le moment où il va décider de faire ses vendanges, etc.
«Au Québec, on a choisi de travailler avec des cépages avec une maturation qui est adaptée à notre climat, souligne Dominique. Les cépages hybrides, comme le frontenac, le seyval ou le vidal vont mûrir plus vite que du cabernet sauvignon par exemple, un cépage vitis vinifera [moins adapté à nos conditions climatiques]. Cela dit, avec le réchauffement climatique, on peut maintenant planter du merlot ou du riesling au Québec et on gagne en maturation avec ces raisins-là.»

On détermine le taux de sucre d’un raisin avec son degré Brix, qu’on obtient à l’aide d’un appareil appelé réfractomètre.
«Ce qu’on recherche dans l’idéal, c’est un degré Brix entre 22 et 24», indique Julia Torchut, œnologue chez Elnova.
Une fois ses raisins récoltés, le vigneron peut décider d’amener du sucre de deux façons dans un vin : soit il arrête la fermentation, soit il va ajouter du sucre pendant celle-ci, une étape qu’on appelle la chaptalisation.
«Il y a beaucoup de gens qui ont peur de parler de chaptalisation, mais on en fait partout dans le monde, souligne Julia Torchut. Il n’y aucun enjeu avec cela, car tout le sucre est transformé en alcool. Il n’en reste presque plus dans le produit final.»

Dans le cas des bulles, ça sera un peu différent, car selon le type de vin mousseux que le vigneron voudra faire, le taux de sucre sera différent selon qu’il fait un vin mousseux doux, demi-sec, sec, extra-sec, brut, extra-brut ou encore brut nature. De plus, s’il ajoute ou non du sucre pour la deuxième fermentation en bouteille, on parlera de vin mousseux dosé ou non dosé.
Le sucre en bouche
Et qu’en est-il du sucre quand arrive le moment de la dégustation d’un vin?
«On considère au Québec que quand on a moins de quatre grammes de sucre par litre, on est dans un vin sec et la plupart des vins faits ici en ont moins que ça, explique Julia Torchut. Pour ressentir le sucre à la dégustation, il faut qu’on soit entre 6 à 10 grammes de sucre par litre, et encore là, je ne suis pas certaine que les gens qui ont moins l’habitude de déguster le percevraient.»
Si on a parfois une impression de sucrosité dans un vin, cela peut être dû à de l’élevage en barrique ou à de l’élevage sur lie, explique l’œnologue.
Cela dit, le sucre, tout comme les acides et le taux d’alcool, contribue à l’équilibre d’un vin.
«Ce n’est pas mal d’avoir un peu de sucre dans un vin, ça va parfois contribuer à sa rondeur, estime Dominique Fink.

Et les consommateurs aiment parfois plus le sucre qu’ils ne le pensent.
«Il y a un vigneron qui me racontait : les gens veulent un vin sec et quand je leur sers un vin à quatre grammes de sucre par litre au lieu de deux, ils l’aiment plus. On a des conceptions qui sont parfois fausses sur le vin, rappelle la biologiste moléculaire. Il y a des vins qui sont extrêmement populaires comme le Ménage à trois qui contient 12 grammes de sucre par litre. Tout dépend du marché que le vigneron veut cibler.»
Donc finalement, le sucre dans le vin est une question de raisin, et des choix du vigneron faits au champ et/ou chai.